Texte tiré du catalogue de 1985

« Un carton d’invitation comme tant d’autres. Ou différent, peut-être ?

Le thème annoncé, en effet, retient soudain l’attention:

“ Du sport aux rites, parcours imaginaire et ludique”.

Octobre 1981. On gare la voiture. Il est tard ce soir-là, sous les arbres du parc de l’Institut national d’Éducation populaire de Marly-le-Roi. Entrons. Deux gardiens de but de hockey sur glace monumentaux situent l’entrée. Ici débute un itinéraire singulier, riche en surprises, utilisant divers moyens, diverses techniques: toiles, collages, structures colorées et lumineuses, jeux dont le visiteur, le voyageur, se trouve malicieusement amené à devenir l’initié, l’acteur et le complice; vidéo enfin, au traitement non dénué de trouvailles personnelles.

Découverte d’une jeune femme amusée de ses propres recherches et résultats, qui ne constituent visiblement déjà plus pour elle que de nouveaux points de départ. Modeste mais heureuse de parler de ce qu’elle a entrepris, de ce qu’elle souhaite faire. Chevelure noire, regard vif posé sur les réalités, ou les apparences, et leurs constantes mutations en trompe-l’œil.

Le Musée du Sport français décide de faire l’acquisition d’une sculpture-jeu : cette brillante jambe noire-et-jaune de bagnard découpée dans un carton fort et qui shoote dans un ballon auquel la rattache une lourde chaîne – condition du footballeur professionnel contemporain ? -Une grande toile “Partition pour motos”, avec ces masques surgis d’une nuit mauve entre également dans les collections. C’est le début d’un dialogue qui paraît encourager l’artiste. Se jetant dans de nouvelles entreprises, elle semble multiplier le temps. Elle voudrait aller vite, plus vite. Mais plus loin surtout? Elle a d’autres idées, d’autres projets, d’autres espoirs. Elle avance, avec une gaieté lucide. Sait-elle que le chemin va tourner brusquement et qu’au-delà de cette rupture, il n’y aura plus rien…

Plus rien?

S’il est certain que nous ne saurons jamais jusqu’à quel point nous aurait mené cet esprit inventif, celui d’une créatrice si heureusement capable d’étonner, la donation décidée et voulue par Jacques Lechalupé en faveur des collections du Musée du Sport français a mieux permis de se rendre compte que l’ensemble des œuvres conçues et menées à bien par Marie-Paule LECHALUPÉ, que cet ensemble donc pouvait témoigner avec justesse des promesses et de l’originalité d’un talent.

Cette donation, nous l’avons acceptée avec honneur. Elle prolongeait, elle traduisait parfaitement, l’esprit même des entretiens tenus avec l’artiste. Elle vient enrichir de manière évidente notre Département des Représentations iconographiques du thème sportif, en lui apportant la tonalité toute personnelle d’une femme et d’une « plasticienne » qui avait compris que la passion de millions d’êtres humains pour les formes actuelles de la pratique sportive ne pouvait être dénuée de signification.

Elle cherchait à capter un mouvement, des rites, une force primitive. Puis les analysait et les recomposait en les mêlant aux rythmes violents et syncopés des temps que nous vivons. Ce qu’elle a tenté de comprendre et de dire, il nous appartient désormais de le transmettre, puisque telle est la mission qui nous a été confiée et que nous nous devions d’assumer.

Que le présent livre soit une première parole… »

Jean DURRY

Musée du Sport – 1984